Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

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Messagepar Kenji Shinoda » 28 Jan 2014 21:25

Je crée ce sujet afin d'y faire converger les différentes débats et réflexions intéressant qui fleurissent un peu partout sur le forum et qui donnent lieu parfois à de longs et passionnants échanges. Mais pas seulement. J'avais surtout envie d'un lieu consacré où je, donc nous, pourrions y aborder des sujets avec une approche plus réfléchie (sans vouloir être prétentieux) et plus approfondie, afin que nous puissions échanger (cliché de dire ça.. je sais) mais aussi comprendre les logiques qui accouchent des point de vues qui ne sont pas les nôtres, confronter nos arguments dans un (sain) conflit didactique afin de les aiguiser d'une part et peut-être de les reconsidérer d’autre part.
C’est donc dans ce but idéal et dans un esprit de soif d’apprendre et de comprendre que je crée ce petit coin « sérieux »

Voilà assez dit.
Je me lance avec ce premier sujet de réflexion : le manga est-il un art ? Je pose cette question car j’ai par deux
ou trois fois lu sur ce forum que certains ne considéraient pas le manga comme une forme d’art (d’ailleurs je me rappelle que quelqu’un avait prétendu que c’était la manière de considérer dominante au Japon).
Très bien. Mais deux ou trois questions se posent alors et méritent fondamentalement d’être éclaircie.
Le bon sens voudrait que dans un premier temps nous nous accordions sur la définition d’art et en déduire un ensemble systématique de caractéristiques discriminantes.
Ensuite, si la bande dessinée est communément considérée comme le 9e art (bien que ceci soit contesté par certain des premiers intéressés), et si le manga est le versant japonais de la bande dessinée, pourquoi un tel débat alors.

Avant de me lancer, je tiens à avouer que, n’ayant jamais lu de traité de philosophie d’un quelconque penseur, ma culture philosophique se rapproche du néant, sans que réfléchir profondément n’eut jamais été pour moi un luxe mais bien au contraire une nécessité (quotidienne). Je transforme même cela en atout fondamentale : mes opinions ne souffriront pas d’une influence venue d’une quelconque personnalité d’autorité philosophique (…reste celle sociétale bien entendu) qui m’aurait « inceptionner » sa conception : ainsi ma première position sur un sujet sera le fruit d’une réflexion originale et personnelle.

Cela étant précisé.
C’est en terminale, durant mes cours de grec anciens, que j’ai trouvé (au fil de discussions passionnantes avec ma merveilleuse prof.) ce qui m’a semblé être une définition satisfaisante de ce qu’est l’art.
L’art serait la manière esthétique, originale et unique de faire face à une contrainte.
Je vous laisse avec cette phrase sans aucun développement pour l’accompagner pour l’instant.
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar JigoKu Kokoro » 29 Jan 2014 19:11

Pour moi l'art est avant tout une expression de la créativité. Après désigner ce qui en est où pas, c'est une question de sensibilité et d'appréciation. On est en général plus ou moins sensible à une forme d'expression artistique ou non. Certains trouve que la cuisine en est un d'autre l'architecture, etc... Mais réduit a sa plus simple expression (4 murs un toit, une assiette de pâtes) est-ce de l'art ? Oui et non ^^ Prenez cette assiette mettez là au milieu d'une expo avec un thème precis et une pensée derrière et cela peut devenir de l'art... (Même si ces œuvres sont ridicules à vos yeux ou aux mien, elles parlent souvent à quelqu'un)
Pour en revenir au thème, le manga (dessins et histoire) me parle beaucoup car ils font appel à mon imagination et ma sensibilité, je serais donc tenté de le classé dedans. Même si je reconnais que certains sentent beaucoup le "merchandising" , il n'en reste pas moins que derrière il y a un homme ( ou femme bien sûr ^^ ) avec un crayon qui dessine et ecrit ^^

voilà je pose la seconde pierre à ce topic qui peut amener beaucoup de discussions intéressantes :wink:
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar Ash!! » 30 Jan 2014 08:06

Je pense que c'est comme les films ou jeux vidéo, tu as des films/jeux d'artistes d'un côté et les films/jeux de divertissement de l'autre, alors l'un n'empêche pas l'autre, mais la différence est dans sa conception.
De nos jours on pourrait presque séparer ces 2 catégories par indépendant ou grosse production, même si il devient dur de définir ce qui est indépendant ou pas, au passage je conseille pour les curieux cet épisode sur les jeux indépendants à la Stunfest.

Après comme le dit JigoKu c'est surtout un sentiment subjectif que de considérer tel ou tel chose comme de l'art, pour moi tu prends du Miyazaki ou Otomo, ceux sont des films d'art, mais est-ce que ça veut dire que tous les films d'animations sont de l'art ? Je ne pense pas, si l'on prend les films de Naruto j'appelle ça du commercial.

Si l'on prend le film Batman et Robin (ou même Forever) qui sont des films créés dans le seul but de vendre des jouets (je n'invente rien le réalisateur lui même en est la source), puis tu as The Dark Night qui est toujours un Batman mais réalisé avec la seule envie de faire un bon film.

Enfin le plus j'y pense, le plus je me dis que je n'ai pas de réponse à la question.
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar C8H10N4O2 » 30 Jan 2014 14:33

Ash!! a écrit:Je pense que c'est comme les films ou jeux vidéo, tu as des films/jeux d'artistes d'un côté et les films/jeux de divertissement de l'autre, alors l'un n'empêche pas l'autre, mais la différence est dans sa conception.


Même quand il a vocation de faire réfléchir, l'art reste un outil de divertissement. La différence en "qualité" perçue est pour moi fonction de l'effort et de l'inspiration mis en oeuvre.
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar Kenji Shinoda » 31 Jan 2014 01:33

Jigoku Kokoru a écrit:Pour moi l'art est avant tout une expression de la créativité.

Ta formulation est intéressante Jigoku-san: tu partages déjà là 33% de ma définition sachant que la créativité est la capacité à proposer solution originale à un problème.

Vous relevez, Ash et Jigoku, deux notions récurrentes importantes:

- Premièrement
Jigoku a écrit:Certains trouve que la cuisine en est un d'autre l'architecture, etc. ... Mais réduit a sa plus simple expression (4 murs un toit, une assiette de pâtes) est-ce de l'art?

Pour rebondir là-dessus, je voudrais faire part d'un point de vue extrêmement intéressant car révélateur d'un aspect important de la question. Comme je vous l'ai dit, lors des discussions en cours de grec avec ma délicieuse prof. ou encore avec mon prof. de philosophie au doux nom siroté (!), celle-ci nous a appris lors de traduction de certains textes, que le mot grec τέχνη ("technè") pouvait se traduire, dans certains contextes, par « art » sachant que ce terme n'existait pas littéralement (c'est un mot latin) avec la compréhension que nous lui donnons aujourd’hui. Et comme vous avez pu le constater, ce mot τέχνη a donné en français la famille de mots issu de "technique ". Et c'est en cela que c'est intéressant. En effet, pour ne pas parler d’art, les grecs mettaient en valeur l’originalité mais surtout l’efficacité d’un savoir-faire, la technique. Je ne suis plus sûr de l’importance du caractère esthétique de la chose.
Toujours est-il que ce que nous, occidentaux contemporains, appelons art, n’était en fait chez les grec qu’affaire de savoir, en l’occurrence de savoir faire. En effet notre compréhension contemporaine de l’art est, selon moi, plus réductrice. En quoi ? En ceci que là où le grec ne faisait pas de distinction entre les sachant-faire (ou savant-faire si vous préférez), l’occidental d’aujourd’hui fait au sein de ce corps une nouvelle distinction : le sachant-faire ARTiste et le sachant-faire ARTisan. Constatez par vous-même l’étymologie commune.
Or quelle distinction faisons-nous à notre époque, entre l’artisan et l’artiste. Pour résumer ce que j’ai dit précédemment, faisant d’abord état de leur point commun à savoir que tout deux font preuve d’un savoir-faire ouvrant la possibilité à l’expression de leur créativité: l’artisan verrier, le sculpteur, l’artisan pâtissier, le peintre, l’artisan ébéniste, le comédien.
A quel moment apparaît cette ligne de démarcation? Il me semble que selon l’acceptation commune, l’objet de création (matériel ou immatériel) devient artistique ou artisanale selon s’il est le produit d’une conception originale, càd sans précédent, unique, càd qui n’est pas destiné à être reproduit en plusieurs exemplaires. C’est apparemment sur ces deux aspects que repose la distinction aujourd'hui selon moi.

-Deuxièmement
Ash a écrit:…pour moi tu prends du Miyazaki ou Otomo, ceux sont des films d'art, mais est-ce que ça veut dire que tous les films d'animations sont de l'art ? Je ne pense pas, si l'on prend les films de Naruto j'appelle ça du commercial.

Si l'on prend le film Batman et Robin (ou même Forever) qui sont des films créés dans le seul but de vendre des jouets (je n'invente rien le réalisateur lui même en est la source), puis tu as The Dark Night qui est toujours un Batman mais réalisé avec la seule envie de faire un bon film.

Tu soulèves une remarque intéressante dans le sens ou cet argument est assez répandu.
Très bien Ash. Quel est ton avis dans ce cas-là concernant l’œuvre de Michel-Ange qui a peint le toit de la chapelle Sixtine à la commande des autorités du Vatican : n’était-ce pas là d’un côté pour lui une affaire en or et de l’autre pour l’église de faire une démonstration de sa puissance ?
En fait, j’aimerai comprendre en quoi selon toi l’entreprise à but lucrative d’un homme est-elle contradictoire avec l’expression artistique.
Pour reprendre tes deux exemples, est-ce que ce ne serait pas plutôt la qualité douteuse et contestable, purement et simplement, qui viendrait remettre en question l’ »articité » d’une production, de manière totalement indépendante du but visée. Je pense qu’en cherchant sans trop se forcer on peut aisément trouver des contre-exemples.

Caféine a écrit: La différence en "qualité" perçue est pour moi fonction de l'effort et de l'inspiration mis en œuvre.

Je te rejoins pour ce qui est de l’inspiration perçue dans une œuvre, Caféine, mais en ce qui concerne l’effort je me pose qu’en même la question suivante: est-ce que l’effort perçue, même faussement, est réellement gage de qualité: lors de la réalisation de s’on œuvre l’artiste n’aura pas forcément à fournir un effort si conséquent s’il maîtrise avec aisance la technique qui lui a permis sa création. Sauf si bien sur tu te mets à considérer non pas l’effort fourni pour créer l’œuvre en question mais celle fournie pour l’acquisition de la technique nécessaire à la réalisation de l’œuvre.
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar Ash!! » 31 Jan 2014 02:20

Kenji Shinoda a écrit:En fait, j’aimerai comprendre en quoi selon toi l’entreprise à but lucrative d’un homme est-elle contradictoire avec l’expression artistique.

Que ce soit les Batman de Nolan (qui ont coûté des centaines de millions) ou les films de Miyazaki, on ne se cachera pas que la volonté derrière est d'amener des bénéfices, je ne vois pas pourquoi l'art dans n'importe quel forme ne devrait pas être rémunérer et je ne pense pas avoir dit le contraire, ça reste un service qui donc nécessite revenu.
Après la différence, c'est que d'un côté tu peux délivrer ce service en y mettant corps et âme, ou tu peux le faire sans aucune volonté ou effort, au final tu es payé la chose de toute manière.
La vrai question pour moi serait concernant les très mauvais films ou animes/manga, mais où pourtant l'auteur a réellement fait de son mieux pour produire une grande oeuvre, peut-on considérer cela comme de l'art ?

Sinon 2 films assez sympa sur la question c'est "Art School Confidential", qui malgré ses défauts reste intéressant (et divertissant) dans son traitement sur ce qu'est l'art. L'autre c'est le documentaire "Exit Through the Gift Shop".
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar Kenji Shinoda » 05 Fév 2014 21:10


Très bien Ash, je te rejoins donc sur cette idée qu'il est normal pour un artiste de vivre de son art.
Quelques interrogations cependant.

• concernant les œuvres visuelles en général (film, anime, séries etc.,), puisque tu en parles plus spécifiquement, ne fais-tu pas omission du fonctionnement du système de création actuelle, où pour créer une œuvre s'additionnent différentes personnes? Si l'on devait retenir parmi tous ces gens seuls ceux dont les décisions influent réellement sur l'œuvre on obtiendrait la liste suivante:
- le scénariste (dans l'animation il s'agit de l'auteur du manga)
- le réalisateur et le metteur en scène (pour le cinéma)
Ou
"le dessinateur en chef" (encore une fois l'auteur du manga)
- et enfin et surtout le Producteur de l'œuvre.
Si à présent tu tiens à évaluer le caractère artistique il est normal de considérer communément l'ensemble des contributions artistiques individuelle comme un tout. Mais artistique seulement. Ainsi ton accusation concernant la priorité lucrative sur celle artistique d'une œuvre ne devrait-elle pas être imputés aux producteurs et de manières plus générales aux intérêts financiers derrières une œuvre?
Pour reprendre ton exemple judicieux de Naruto: on peut apprécier la valeur artistique de cet animé sur le plan visuelle, scénaristique, musicale. Cependant le choix faits des longueurs ajoutées qui font que l'anime finisse par souffrir de baisses assassines de rythme, de l'abandon du souci du détail en ce qui concerne les seconds plan, le tout sur un rythme de production effrénée, pour,comme tu fais bien de le remarquer, maximiser les profits, ça ne peut être un choix artistique et seul sont coupables les producteurs et autres financiers.
Et c'est aussi un phénomène qu'on retrouve dans une moindre mesure dans le monde musicale et ce lui de l'édition.

Ash!! a écrit:La vrai question pour moi serait concernant les très mauvais films ou animes/manga, mais où pourtant l'auteur a réellement fait de son mieux pour produire une grande oeuvre, peut-on considérer cela comme de l'art ?

• Et inversement, un amateur d'art peut-il créer une œuvre artistique dans sa vie avant de retomber dans ce que les gens qualifierait de non-art?
Est-ce que tu ne crois pas Ash qu'on ne peut y répondre au stade actuelle de notre réflexion. En effet, comme je le soulignais dans mon précédent poste: ce genre de question secondaire (dans le sens logique et non pas inintéressante) ne peut être traitée tant qu'une définition satisfaisante de l'art ne peut être formulée. Aussi, dans cette perspective, j'espérait avoir de toi (et des autres évidemment) ta réflexion sur cette question fondamentale avant de nous éparpiller dans des considérations plus subsidiaire. Quel ton avis par rapport aux précédents postes sur cette question?

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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar Ash!! » 05 Fév 2014 21:53

Je ne pense pas qu'il y est de réponse précise, c'est un peu comme le débat que l'on a eu pour essayer de définir ce qu'est un RPG, le terme évolue au fil des années, il y a sûrement une époque ou le mot art pouvait être défini, mais ce concept à beaucoup trop évolué, de nouveaux "type" d'art furent créé, on est arrivé à un point où chacun a sa propre définition de l'art, ce qui n'est pas plus mal puisque quelque chose d'artistique c'est quelque chose qui nous touche d'un simple regard (ou visionnage pour les animes/films), et chacun a un regard différent/personnel, ce qui peut être considéré comme artistique par une personne ne le sera pas forcément pour les autres, mais je pense que tant qu'une personne y voit de l'art, on peut définir ce produit comme tel.
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar Kenji Shinoda » 06 Fév 2014 21:48

J'entends parfaitement ton raisonnement Ash.
Mais une fois de plus ne confonds-tu pas définition universelle d'une part et interprétation personnelle et relativiste donc de cette définition d'autre part?

La définition sur laquelle je nous propose de nous pencher se doit de prendre en compte, par souci d'universalité, l'évolution des formes d'expression artistique, comme tu as su le souligner. Ainsi cette définition se doit d'essayer d'être intemporel, ou du moins, l'être le plus possible.

Et c'est ce caractère universel et absolu qui offre justement la possibilité d'une interprétation; interprétation qui se doit tout de même de garder une cohérence avec la raison et l'esprit initiale de la définition.

Eh bien pour illustrer mes propos ci-dessus, je me permets de reprendre la définition que j'ai proposé en fin du premier poste, pas seulement par narcissisme (^^) mais parceque, dans l'attente d'une meilleur proposition, se trouve être celle qui me paraît être la plus appropriée à mon sens: "L’art serait la manière esthétique, originale et unique de faire face à une contrainte."
Pour revenir sur ce que tu disais Ash, voilà les deux champs d'interprétation qu'offre cette définition:
• la "contrainte": ici ce terme, qui renvoie à cette notion de défi, d'obstacle, de réflexion et de solution, offre une quantité foisonnante de déclinaisons avec en premier lieu la contrainte matériel du support (physique ou virtuelle), du matériau, de l'outil; mais aussi la contrainte du thème, du modèle, de la formulation, de la société, des cultures.
• la " manière esthétique": cette notion du "beau" est une porte ouverte à l'interprétation personnelle en fonction de l'influence de nos goûts personnels mais aussi ceux induits plus ou moins inconsciemment par notre propre culture. Mais si le Beau est une projection de soi sur l'objet, on peut cependant se poser la question (à l'instar de Sasori et Deidara ^^) de la nécessité de son intemporalité.

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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar Yartrub » 07 Fév 2014 02:19

Je propose que l'art serait l'expression du maitre artisan dans l'artifice de la nature afin de dévoiler une méta-réalité.

Comment peut-on prétendre à la recherche de la beauté avec l'art moderne ? De même si on considère des disciplines comme la cuisine, il y a eu du bon, de la belle présentation, mais c'est bien faire une entorse à l'esthétique de trouver du beau dans ces produits, c'est bien autre chose.

La notion de maitrise de la discipline dans lequel s'exerce l'art me semble une constante, même si cela n'exclut les autodidactes.

L'artifice est très important, car un très beau coucher de soleil n'est pas artistique, aussi magnifique soit-il. Je préfère ce terme à contrainte, même si on peut y retrouver certains thèmes communs.

La méta-réalité, c'est apporter un objectif à l'art, dans un cadre plus vaste que simplement le beau (qui de nos jours on peut difficilement garder tel quel). Ce qui est le plus de la notion de la révélation, c'est la photographie, qui va être très proche de la réalité capturée, et qui pourtant révélera bien des choses qui ne sont pas perçues par le quidam qui passerait devant la scène réelle. Mais bien sûr on peut l'appliquer à tous.

Si faut développer quelque chose à propos de cette définition, ce sera surement ce dernier point.
Philippe Jeammet a écrit:L'être humain peut avoir peur de ce qu'il désire le plus et faire le contraire de ce qui le rendrait heureux par peur du risque de la déception
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar C8H10N4O2 » 07 Fév 2014 13:37

Un des plus gros problèmes quand on aborde l'art, c'est la confusion dans les termes utilisés.
En ce qui concerne les arts visuels, on mélange allègrement l'art lui-même et l'esthétisme, qui n'en est qu'une composante (pas forcément indispensable d'ailleurs), de la même maniere qu'on confond euphonie et musique. Il n'y a pas de définition universelle de l'art, mais une par spectateur/auditeur. L'art est un stimulus qui parle à nos émotions et/ou à notre intellect, ce qui fonctionne pour l'un ne fonctionnera pas forcément pour l'autre.
La propension de certains à vouloir le parer de vertus mystiques et en faire un vecteur d'ascension spirituelle n'aide pas à la clarté du propros. L'art parle à l'individu, et ce que chacun y perçoit et en retire lui est propre. Vouloir en tirer une définition universelle ne peut pas donner de résultats probants, si ce n'est fournir une scène pour y étaler son "brillant intellect". L'art peut nous toucher (de manière positive ou négative) ou nous laisser indifférents, y chercher plus c'est se livrer à un exercice de sculpture sur nuages.
Modifié en dernier par C8H10N4O2 le 07 Fév 2014 23:12, modifié 1 fois.
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar Yartrub » 07 Fév 2014 21:00

Ash l'a bien dit lorsqu'il a commencé à intervenir que le travail de définition précises pour des choses aussi vastes est toujours semé d'embuches, et n'aboutit jamais de manière satisfaisantes pour tous.

Par contre ce n'est pas parce qu'il n'y a pas une définition universelle qui convient parfaitement à tous que ce travail est inutile, ni qu'il faut résumer cela par "chacun sa définition ou simplement sa perception".

Bien sûr il faut avoir ces limitations à l’esprit, une telle discussion ici est sans grande prétention, mais c'est autant plus amusant de cette façon.
Philippe Jeammet a écrit:L'être humain peut avoir peur de ce qu'il désire le plus et faire le contraire de ce qui le rendrait heureux par peur du risque de la déception
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar Kenji Shinoda » 08 Fév 2014 21:15


De la possibilité d'une définition.
Spoiler :
Je me relis dans mes précédents postes et je me rends compte effectivement d'une maladresse dans ma formulation de l'objectif: en réalité dans mon esprit il n'était pas question de trouver "la définition satisfaisante" mais plutôt "une définition qui soit la plus satisfaisante possible" dans le sens où la vérité absolue, bien que (selon mes convictions) elle existe, elle ne peut être atteint par nous êtres humains mais seulement approchée ( c'est là toute une thèse que j'ai eu à défendre dans le passé mais c'est une toute autre histoire ^^). Comme tu as raison de le souligner Yartrub, je ne suis pas d'avis non plus d'un totale relativisme...c'est se délester trop facilement du sujet....(petite digression au passage: j'ai la nette impression que ce phénomène de lâche et faux relativisme consensuel soit devenu la position de confort que beaucoup de gens arborent précipitamment aujourd'hui lorsqu'ils sont face à une question de sens).
Et donc sur ce point je me pose en contradiction face à vous deux Ash et Cafféine.


De la définition de Yartrub:
Spoiler :
l'art serait l'expression du maitre artisan dans l'artifice de la nature afin de dévoiler une méta-réalité.


•Ne trouves-tu pas rédhibitoire que d'insérer dans une définition de l'art un quelconque dessein particulier? Pour le coup je n'aurai pas mieux formuler mon propos que Caféine avec son amusante métaphore. Je pense sincèrement que c'est une erreur Yartrub. Je crois, et dis moi si je me trompe, que tu as dû prendre pour généralité des œuvres qui étaient effectivement chargé d'un message politique, spirituelle ou autre tels qu'un Guernica de Picasso ou une Ligne Verte de Frank Darabont?

• Par contre je n'ai pas saisi ta notion d' "artifice de la nature". Je ne vois pas non plus le lien avec la notion de contrainte que j'utilise.

• " Expression du maître artisan"...pas sûr que "maître artisan" soit vraiment nécessaire ni très clair cependant j'entends parfaitement et rejoins là aussi ces notions de maîtrise et de technique vers lesquels ces termes renvoie puisque c'est ce que traduisait ce terme/notion de "manière" que j'utilise moi-même dans la définition que je propose.


De l'avis de Caféine:
Spoiler :
J'entame d'abord ce avec quoi je suis en profond désaccord avec toi:

Il n'y a pas de définition universelle de l'art, mais une par spectateur/auditeur.

Je me suis déjà exprimé là-dessus en début de poste.


•Tu as bien raison Caféine de nous rappeler ces précisions sémantiques. Auxquelles d'ailleurs, je souhaite ajouter une vision plus globaliste et fractionnée: (# pour "différent de")
Esthétique # Artistique
Esthétique Sonore=Euphonie # Musicalité
Esthétique Culinaire=Délicieux, Savoureux # Gastronomique

l'esthétisme, qui n'en est qu'une composante (pas forcément indispensable d'ailleurs)

"Qu'une composante" bien évidemment; mais " pas forcément indispensable" là par contre tu dépouilles carrément l'art de son essence même!
Que lui reste-t-il dans ce cas? Je te demande ça au delà de tout relativisme de la perception esthétique.
Est-ce que tu n'as pas l'impression de rompre avec des siècles d'une tradition qui est celle de sublimer son expression, quelque soit sa forme? Depuis quand selon toi l'esthétique n'est plus l'achèvement de l'artiste? Et, encore une fois quelque soit le support de l'expression artistique, quelque soit sa représentation (figurative ou abstraite).
J'aimerais que tu me présentes 2 ou 3 oeuvres où clairement la recherche esthétique n'est indubitablement pas l'objectif de l'artiste et qu'on en discute plus précisément.

Je terminerai avec les propos avec lesquelles je suis en parfaite adéquation .
L'art est un stimulus qui parle à nos émotions et/ou à notre intellect

Pour le coup là tu fais mouche Caf, et je ne modifierai ni n'ajouterai quoique ça ce soit à cette phrase!
Au passage...n'est ce pas là une définition universelle et ASSEZ satisfaisante ^^!
Ce qui est très intéressant dans ce que tu proposes c'est que tu te places là dans le point de vue de l'achèvement de l'œuvre alors que ce que j'avais proposé tenait un point de vue de l'art qui était de celui de sa construction!
Et c'est donc avec cette parfaite adéquation que je me permets, avec enthousiasme, d'utiliser tes propos pour compléter les miens:
L'art serait la Manière Esthétique, Originale et Unique de faire face à une Contrainte, Renvoyant un Stimulus à l'Intellect et/ou à l'Affect

Tu noteras que j'ai préfère finalement le terme d'affect, plus général et qui renvoie à l'idée de l'âme et qui est en opposition à l'intellect de l'esprit.

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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar C8H10N4O2 » 09 Fév 2014 09:55

Kenji Shinoda a écrit:
Spoiler :
Ce qui est très intéressant dans ce que tu proposes c'est que tu te places là dans le point de vue de l'achèvement de l'œuvre alors que ce que j'avais proposé tenait un point de vue de l'art qui était de celui de sa construction!


C'est une approche conditionnée par la question que je me pose quand j'aborde un débat d'idées. Le comment passe après le pourquoi en ce qui me concerne, la conséquence de ce que mes professeurs de philosophie avaient appelé en son temps "un penchant prononcé pour les analyses conceptuelles". Pour utiliser une analogie, le meilleur des plans de voyage ne sert à rien si on ne connait pas la destination.

Pour ce qui est de la partie sur l'esthétisme, je reconnais ne pas avoir clarifié quel sens que je lui donne dans le contexte du présent sujet. J'en fais le pendant visuel de ce qu'est l'euphonie pour l'expression sonore, à savoir ce qui "plaisant" ou "beau". Si on prend le terme de manière plus large, ce que j'ai posté plus tôt peut effectivement sembler nébuleux.
Quand à ce que tu perçois comme une définition de l'art dans mes propros, je ne pense pas que c'en soit une. C'est, au mieux, une description très simplifiée de son effet et de sa fonction. Pour pouvoir définir quelque chose, il faut comprendre la chose en question ... et ce n'est pas mon cas.
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar Kenji Shinoda » 10 Fév 2014 01:39


Petite digression.
Spoiler :
Caféine a écrit: C'est une approche conditionnée par la question que je me pose quand j'aborde un débat d'idées. Le comment passe après le pourquoi en ce qui me concerne, la conséquence de ce que mes professeurs de philosophie avaient appelé en son temps "un penchant prononcé pour les analyses conceptuelles". Pour utiliser une analogie, le meilleur des plans de voyage ne sert à rien si on ne connait pas la destination.

C'est marrant que tu parles de ça car je viens tout récemment de regarder une conférence intéressante, sur la question de l'éthique et de son application, et où l'un des deux intervenants rappelle avec beaucoup de sagesse que quelque soit le sujet abordé, se perdre dans d'interminables discussions spécialisées, où les fragmentations du savoir ne sont plus interconnectées, oblitère de fait la finalité et ouvre la voie vers une dérive du débat ainsi que sa perte de de sens.
Bref tout ça pour dire que je partage avec toi l'opinion selon laquelle la finalité est prépondérante par rapport au moyen bien qu'ici je n'ai pas pensé à l'appliquer.


De la compréhension de l'art.
Spoiler :
Pour pouvoir définir quelque chose, il faut comprendre la chose en question ... et ce n'est pas mon cas.

Ce que nous essayons de faire c'est effectivement d'essayer de chercher une définition (la plus satisfaisante possible) et pour ça nous confrontons nos points de vue pour tenter de dégager quelque chose qui soit le plus juste et le plus précis possible, autrement dit, en terme plus simple, nous nous efforçons finalement de comprendre l'art : finalement c 'est un peu ça ^^ : Image
Aucun de nous cinq jusqu'à présent n'a eu la prétention en se lançant dans cette discussion de la détenir de manière absolue mais plutôt d'avoir des opinions sur la question qu'on pense pertinentes.


De ta proposition.
Spoiler :
Quand à ce que tu perçois comme une définition de l'art dans mes propros, je ne pense pas que c'en soit une. C'est, au mieux, une description très simplifiée de son effet et de sa fonction.

Tu sous-estimes tes propos Caféine.
En effet, si donner une "description...de son effet", même simple, dès lors qu'elle est juste et précise, n'est pas une définition qu'est ce que c'est? Une définition n'est elle pas censé "énoncer des attributs qui distinguent une chose, qui lui appartiennent à l'exclusion de toute autre" (Littré) ?
L'effet sur l'âme et l'esprit que tu décris n'est-il pas un élément caractéristique et nécessaire (mais pas suffisant) de l'art? (Par contre je n'ai pas compris pourquoi tu parles soudainement de "fonction" vu la position que tu avais plus bas sur une quelconque mission donné à l'art...:?: )


De la nécessité de l'esthétique.
Spoiler :
J'attendais aussi que tu développes ton idée sur cette question.
Kenji Shinoda a écrit:
Caféine a écrit:l'esthétisme, qui n'en est qu'une composante (pas forcément indispensable d'ailleurs)

"Qu'une composante" bien évidemment; mais " pas forcément indispensable" là par contre tu dépouilles carrément l'art de son essence même!
Que lui reste-t-il dans ce cas? Je te demande ça au delà de tout relativisme de la perception esthétique.
Est-ce que tu n'as pas l'impression de rompre avec des siècles d'une tradition qui est celle de sublimer son expression, quelque soit sa forme? Depuis quand selon toi l'esthétique n'est plus l'achèvement de l'artiste? Et, encore une fois quelque soit le support de l'expression artistique, quelque soit sa représentation (figurative ou abstraite).
J'aimerais que tu me présentes 2 ou 3 oeuvres où clairement la recherche esthétique n'est indubitablement pas l'objectif de l'artiste et qu'on en discute plus précisément.


Précision pour Yartrub.
Spoiler :
En me relisant Yartrub je me suis rendu que je n'ai pas expliqué ce qui me gênait dans ton expression de "Maître Artisan".
Mon problème est que l'idée que tu désignes, de surcroît par un terme corporatiste, celui seul qui est capable de produire une œuvre d'art à proprement parler, nous condamne à un carcan qui nous empêcherait de considérer au-delà de ce qui est créer par ces gens (encore que le terme ne sois pas clair) notamment par ceux que tu désignes comme "autodidactes".
D'ailleurs à un moment donné Ash pose la judicieuse question qui est (je me permets de reformuler Ash et dis moi si n'était pas ton idée derrière) de savoir si on continuera systématiquement à qualifier toutes les œuvres ultérieures d'une personne que l'on aura estampillée du titre d'artiste (car à déjà produit quelque chose en tant que telle) d'art, même les plus médiocres?


Modifié en dernier par Kenji Shinoda le 10 Fév 2014 11:53, modifié 1 fois.
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Messagepar kthulu » 10 Fév 2014 11:50

Kenji Shinoda a écrit:"Qu'une composante" bien évidemment; mais " pas forcément indispensable" là par contre tu dépouilles carrément l'art de son essence même!

L'art contemporain par esemple qui n'est que rupture et transgression des "codes" déjà établis.
Il y a l'exemple de Duchamps avec son urinoir ainsi que ses autres œuvres issues du "ready-made". Car le Beau à tendance à s'opposer à l'utile et au fonctionnel.
On peut aussi parler du mouvement dadaïste qui prônait une remise en cause de toute les conventions artistiques autant au niveau idéologique qu'esthétique.
De même certains artistes font une esthétique du laid "La Charogne" de Baudelaire en est un bel exemple tout comme la "Vieille Femme grotesque" de Quentin Metsys.
Je rajouterais le cas de la musique aléatoire (voir ici pour un exemple) peut on parler de recherche esthétique ou d'euphonie dans cette musique?
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar C8H10N4O2 » 10 Fév 2014 17:33

L'art est un outil d'expression, n'utiliser que des moyens qui rentrent dans le cadre du plaisant représente une limitation à ses possibilités. S'en tenir strictement à l'esthétisme -pour les arts visuels- et à l'euphonie -pour les arts sonores-, c'est un peu comme si la littérature se limitait à livrer des histoires heureuses, vécues par des gens heureux dépourvus de défauts. A ne pas prendre de risques, en se contentant de ce qui est communément apprécié, on court le risque de devenir fade.
Pour rester dans l'esprit de ma "définition" de l'art, le pire tort qu'il puisse avoir est de laisser indifférent. C'est ici qu'intervient la notion d'effort dans la création que j'avais abordée dans mon premier post. Ce n'est pas l'effort physique qui requiert la maitrîse d'une technique, mais l'investissement personnel, la part de lui-même que l'artiste met dans son oeuvre et ce qu'il cherche à exprimer. Après des siècles/décennies de production, il ne reste pas grand chose qui n'aie été fait. Si l'artiste ne s'investit pas personnellement dans ce qu'il fait, rien ne distinguera ce qu'il produit de ce que produisent les autres. Et ça, c'est pour moi bien plus proche de la définition d'un produit de consommation que de ce que l'art est capable d'être.
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar Kenji Shinoda » 13 Fév 2014 11:02


De la nécessité de l’esthétique.
Spoiler :
Khtulu et Caféine, qand il s’agit d’une représentation, n’est il pas fondamentale de faire la distinction entre l’objet représenté, d’une part, et sa représentation d’autre part, sous peine de faire une grave faute de jugement ?

Brève rétrospective sur l’évolution du sujet dans l’art.
En effet, la mutation artistique majeure dans l’art, sous toutes ses formes, qui s’est enclenché en occident avec l’avènement de la seconde révolution industrielle, a permis d’élargir le choix du sujet, cantonné jusque là à des stéréotypes bien établis,. On a vu ainsi naître des représentations d’objket de moins en moins « noble », , de scènes populaire de plus en plus popoulaire, avec de moins en moins le souci de représenter la réalité (notamment dû à l’évolution de la photographie) ouvrant la voie à des représentations moins sensorielle et plus affective pour atteindre le paroxysme avec l’art abstrait ou la contrainte du sujet physique disparait complètement.
L’on peut choisir de représenter de le laid, comme de ne pas représenter, la recherche esthétique n’en reste pas moins une règle constante. Tu as pafaitement choisi ces deux derniers exemples, Khtulu, aussi vais-je m’en servir pour illustrer ma pensée :
- avec la Vieille Femme Grotesque, l’esthétisme se retrouve ici dans ce réalisme presque caricaturale du visage inharmonieux qui semble transparaître une personnalité qui assume et est qui est au-dessus de cette tare qu’est son physique. , dans les couleurs et les détails de sa tenue.
- La charogne (merci à toi en passant, je ne connaissais pas ce formidable poème !), dépeint ici une vision infâme et malsaine en mariant la description horrifique et saisissante d’un cadavre foisonnant de vie (premier paradoxe) avec la l’évocation d’image et de sentiment sublimée (deuxième paradoxe), le tout dans une succession de quatrains rythmé sur une mesure à deux temps dans une syntaxe et un style légèrs et évocateurs et dont on se délecte à sa lecture. (soit dit en passant, ce dernier quatrain est si sublime que je l’ai appris par cœur ! ^^)
Voilà donc ce que je voulais signifiait par la distinction essentielle entre l’objet, ou plus généralement le sujet, et la représentation, l’évocation qui en est faite.

Khtulu a écrit:L'art contemporain par exemple qui n'est que rupture et transgression des "codes" déjà établis.

C’est juste. Or ce qui nous intéresse ici c’est la question de la nécessité de l’esthétisme, or « la rupture et la transgression » des codes qui régissent entre autre l’esthétisme ne signifie pas rupture avec l’esthétisme. Seule son appréhension est révisée, et ces chaîne brisées, il s’agissait dès lors d’explorer de nouvelles expressions du Beau, de réinventer de nouveau canon.

Caféine a écrit:L'art est un outil d'expression, n'utiliser que des moyens qui rentrent dans le cadre du plaisant représente une limitation à ses possibilités. S'en tenir strictement à l'esthétisme -pour les arts visuels- et à l'euphonie -pour les arts sonores-, c'est un peu comme si la littérature se limitait à livrer des histoires heureuses, vécues par des gens heureux dépourvus de défauts. A ne pas prendre de risques, en se contentant de ce qui est communément apprécié, on court le risque de devenir fade.

Ainsi, faire le choix d’offrir quelque chose qui est déjà apprécier , n’a absolument rien à voir avec l’esthétisme de la représentation. : comme je viens de le commenter ; c’est deux considérations, Caféine, sont parfaitement distinctes l’une de l’autre, sans rapport aucun : d’une part le choix qui peut se poser entre un sujet complaisant et fade ou polémique et risqué ; et d’autre part arriver à sublimer l’un ou l’autre et c’est en ça que résidé le défi esthétique de l’artiste.


De l'investissment personnel
Spoiler :
Caféine a écrit:Après des siècles/décennies de production, il ne reste pas grand chose qui n'aie été fait. Si l'artiste ne s'investit pas personnellement dans ce qu'il fait, rien ne distinguera ce qu'il produit de ce que produisent les autres. Et ça, c'est pour moi bien plus proche de la définition d'un produit de consommation que de ce que l'art est capable d'être.

C’est vrai. Et c’est tellement vrai que s’en est évident. Et c’est là raison pour laquelle je n’avais pas pris la peine de développer ces notions d’effort et d’investissement personnelle qui viennent donner sens à la notion d’expression personnelle et que j’exprimaient dans le caractère « Originale » que soulignait ma définition.


De l'art contemporain.
Spoiler :
Khtulu a écrit:On peut aussi parler du mouvement dadaïste qui prônait une remise en cause de toute les conventions artistiques autant au niveau idéologique qu'esthétique.
Je rajouterais le cas de la musique aléatoire peut on parler de recherche esthétique ou d'euphonie dans cette musique?

Là par contre ça se corse pour moi ^^! En effet je crois qu'à ce stade nos avis risquent de s'entrechoquer comme deux lames de katanas! Mais c'est justement là que ça va devenir le plus passionnant!
Finalement ça aura été toi le premier Khtulu à proposer ce genre d' "œuvre" tel que cet Urinoir de Deschamps. Encore là, c'est un excellent choix car représentatif de cette catégorie. Et je vais m'en servir pour poser ma réflexion au sujet de ce qu'on appelle l'art contemporain.
Plusieurs points à relever de cet "Urinoir":
1•cet urinoir est un objet préalablement élaboré qui n'a pas été conçu par Deschamps, qui l'a simplement détourné et retourné.
2• l'œuvre interpelle certes par son incongruité, mais peut-on parler d'émotion ou de réflexion suscitée?
3• la recherche esthétique n'est ici clairement pas le but.
Avant de poursuivre, je tiens à préciser que je n'ai rien contre ce qu'on appelle l'art contemporain et ce qui est désigné par ce terme de "contemporain" c.-à-d. "rupture et remise en question des codes établis", autrement dit qui s'oppose à l'art classique. Mais se servir de ce prétexte révolutionnaire, radicale et émancipateur pour faire passer pour art toute production, personnelle (jusqu'à un certain degré), singulière, qui interpelle par sa seule originalité, est une voie ouverte à toutes les grotesques prétentions de certains sans réels talents artistiques ou d'autre sans scrupules. Et si cela trouve un écho favorable aujourd'hui c'est essentiellement parce nous vivons dans une société où les gens par esprit de conformisme acceptent tout sous vertu de relativisme universel avec ces fameuses expressions lâchement conciliantes: " à chacun sa vérité" ( ici encore la confusion dévastatrice est faite entre vérité et réalité...mais ça c'est une autre histoire), ou encore "chacun pense comme il veut" ( comme si la question était d'empêcher quelqu'un d'exprimer son opinion). La plupart des gens se refusent, soit par lâcheté, soit par fainéantise intellectuelle, soit par manque d'esprit, de défendre et d' "affirmer" (par la raison et le débat) leur avis. Et je terminerai en exprimant mon inimité en envers ces prétentieux experts qui de dédain vomissent leur fausse supériorité intellectuelle envers l'incrédulité de ceux qui de marbre s'interrogent naïvement sur l'existence de telles excentricités qui à défaut de répondre à leur sens de l'esthétisme ne peuvent se résoudre à les qualifier d'art.
Je mets fin à ce bref coup de gueule contre la niaiserie de l'esprit et les attitudes attentistes. ^^

Revenons à ces productions qu'on qualifie d'art.
C'est là que l'importance sémantique rentre en jeu.
N'est-il pas plus judicieux de faire, une distinction entre œuvres d'Art (ou l'esthétisme est un achèvement) d'une part, et d'autre part Expérience Insolite (bien que l'insolite n'est, bien heureusement, en rien en contradiction avec le caractère artistique) ou encore Évocation Polémique.
C'est une étape nécessaire de cette discussion car autrement le terme d'art ne serait plus ( c'est déjà le cas en fait) qu'un terme fourre-tout.
Pour prendre ton exemple de la musique aléatoire, il n'y a là aucun choix derrière chaque note,donc aucune recherche esthétique, donc aucune volonté, donc aucune personnalité, donc aucun investissement personnel dont parlait Caf. C'est sûrement une expérience marrante qui aboutit à quelque chose mais ça n'a rien d'artistique. De même si je donnais à des macaques des pots de peintures à jeter sur une toile blanche y verras-tu une expression artistique là aussi? Avec le hasard le rendu peut-être surprenamment réussi mais diras-tu là qu'il s'agit d'une expression personnelle et originale?....

Révision de ma définition.
Spoiler :
Je me rends compte qu'une notion essentielle dans l'art manque à ma définition: l'expression.
Art: Manière Esthétique, Originale et Unique, de faire face à une Contrainte, Exprimant un Stimulus envoyé à l'Intellect et/ou l'Affect


De vos artistes "préférés".
Spoiler :
J'aimerais beaucoup connaître ceux dont vous appréciez le plus le travail dans le domaine de la peinture et de la sculpture.
Pour ma part, Klimt est celui dont j'apprécie le plus le style avec ces portraits hypnotiques, presque fantomatiques, de femmes ainsi que de son remplissage en dorure....(par contre je suis moins réceptif à ses tableaux de paysages)
Et j'aimerai aussi cité Fantin-Latour qui en plus de l'époustouflant réalisme dont font preuve ses tableaux, il possède une maîtrise parfaite de la lumière qui ne cesse de me fasciner.
En sculpture j'ai bien trop peu de connaissance en la matière pour pouvoir en désigner un.


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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar C8H10N4O2 » 13 Fév 2014 13:46

Pour ce qui est du premier point, la réponse tient en un seul mot : non.

Je pense qu'il est plus qu'apparent que nos approches respectives de l'art sont diamétralement opposées. La tienne est analytique et cherche à définir l'art comme quelque de quantifiable, mesurable et explicable, comprenant un quoi (le sujet) et un comment (la forme et la technique). La mienne se base sur la perception de l'oeuvre accomplie, le pourquoi.

Le matériau et la manière dont il est traité n'ont pour moi que peu d'importance, seul l'effet produit compte. Comprendre comment l'art fonctionne a pour moi beaucoup -vraiment beaucoup- moins d'importance que de comprendre l'effet qu'il produit. D'une certaine façon, l'oeuvre d'art est pour moi plus un moyen qu'un but.

Parce qu'au final, s'il n'y a ni auditeurs/spectateurs une oeuvre d'art n'est qu'un objet. Elle ne devient une oeuvre qu'à partir du moment où elle est perçue et elle cesse de l'être dès qu'elle ne l'est plus.

La partie essentielle de l'art, ce ne sont pas les motivations du créateur, ni la matière de base qu'il utilise, ni les méthodes qu'il emploie. La partie essentielle de l'art, ce sont les sens et l'intellect de celui qui y est exposé, car ce sont eux qui servent de révélateur au contenu.

PS : à la relecture je me rends compte que je viens de tirer un parallèle entre la définition de l'art et la mécanique quantique.
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar kthulu » 13 Fév 2014 16:22

Kenji Shinoda a écrit: Mais se servir de ce prétexte révolutionnaire, radicale et émancipateur pour faire passer pour art toute production, personnelle (jusqu'à un certain degré), singulière, qui interpelle par sa seule originalité, est une voie ouverte à toutes les grotesques prétentions de certains sans réels talents artistiques ou d'autre sans scrupules.

Je dois avouer que dans mon cas l'art contemporain me laisse de marbre, certaines œuvres arrivent quand même à m'émouvoir et/ou avoir une certaine signification quand au reste je me demande si on peut vraiment appeler ça de l'art.
Avant l'art avait une certaine esthétique désormais dans l'art contemporain si le créateur pense que ce qu'il fait est une œuvre d'art alors s'en est une (quand bien même son œuvre est un mixeur alimenté où tout le monde peut appuyer sur le bouton avec des poissons vivants dedans).
Je serais plus a penser l'art comme un véhicule entre les émotions du créateur d'une œuvre et les émotions de celui qui la reçoit.
C8H10N4O2 a écrit:La partie essentielle de l'art, ce ne sont pas les motivations du créateur, ni la matière de base qu'il utilise, ni les méthodes qu'il emploie.

Alors certaines œuvres pourraient manquer de signification si tu ne sais pas que l'auteur de celles-ci est atteint de nanisme (Je ne me souviens pas du nom de l'artiste en question, mais j'avais mieux apprécié son travail par la suite avec ce détail d'importance) ou les problèmes de vues de certains peintres.
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar JigoKu Kokoro » 16 Fév 2014 17:04

Je reste sur mon avis de départ la notion d'art est avant tout une question de perception personelle liée à notre sensibilité emotionelle à la démarche ou à l'œuvre qui est devant nous. Ceci en sachant que des réalisations annoncés comme de l'art (œuvre, démarche) ou de plus simple chose (bâtiment, artisanat) peuvent passer d'une catégorie à l'autre toujours en fonction de la personne qui est "spectateur". ^^
Cela reste du domaine de la subjectivité personnelle.
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar Kenji Shinoda » 28 Fév 2014 22:44


Caféine a écrit:Je pense qu'il est plus qu'apparent que nos approches respectives de l'art sont diamétralement opposées. La tienne est analytique et cherche à définir l'art comme quelque de quantifiable, mesurable et explicable, comprenant un quoi (le sujet) et un comment (la forme et la technique). La mienne se base sur la perception de l'oeuvre accomplie, le pourquoi.

Je ne peux qu'acquiescer à l'analyse sagace que tu portes sur la différence fondamentale des visées de nos propos respectifs. Tu relèves très bien l'aspect scientifique de mon approche qui n'est en fait rien d'autre que le résultat logique de ma formation dans le domaine des sciences "dures".
Conscient de cette méthodologie cognitive dans je suis empreint et que je revendique, je tiens cependant à préciser qu'au delà de cette analyse que je m'efforce de rendre la plus cartésienne possible, je ne nie ni ne délaisse en aucun cas la dimension affective de la perception du spectateur puisque si tu suis le cheminement de mes propos depuis le début de ces échanges tu observeras que j'ai assimilé (grâce à une de tes précédentes interventions) cet aspect dans un souci d'une définition globale, de l'idée à la perception extérieure, en passant par la conception.
En effet, la prise en compte de la dimension/paramètre subjective de la perception extérieure ne s'oppose pas à l'approche analytique de la question, au contraire son intégration la rend plus complète selon moi.
Nos deux manières d'appréhender le sujet révèle en réalité un mode de pensées et une conception de l'essence sous-jacentes qui sont fondamentales et propres à chacun.


Bref, après ce paragraphe très théoriques et un brin pompeux, essayons de voir plus en détail les idées.



Caféine a écrit:Parce qu'au final, s'il n'y a ni auditeurs/spectateurs une oeuvre d'art n'est qu'un objet. Elle ne devient une oeuvre qu'à partir du moment où elle est perçue et elle cesse de l'être dès qu'elle ne l'est plus.

kthulu a écrit:Avant l'art avait une certaine esthétique désormais dans l'art contemporain si le créateur pense que ce qu'il fait est une œuvre d'art alors s'en est une.

C'est marrant car il y a quelque temps j'ai proposé dans la section jeux "Citron ou Melon" le choix entre deux philosophie: idéalisme ou réalisme. Et cette vision que tu propose est très similaire à celle de l'idéalisme. L'es-tu? Pour ma part, c'est l'inverse: je suis profondément réaliste. Et en ce sens, je ne peux partager l'idée selon laquelle "l'artisticité" d'une œuvre est seulement fonction de l'existence ou non d'une perception personnelle ou collective extérieure. De plus, cette appréhension de l'art s'oppose fondamentalement à l'intemporalité nécessaire que je prône pour une œuvre de cette prétention.



Caféine a écrit:La partie essentielle de l'art, ce ne sont pas les motivations du créateur, ni la matière de base qu'il utilise, ni les méthodes qu'il emploie. La partie essentielle de l'art, ce sont les sens et l'intellect de celui qui y est exposé, car ce sont eux qui servent de révélateur au contenu.

kthulu a écrit:Je serais plus a penser l'art comme un véhicule entre les émotions du créateur d'une œuvre et les émotions de celui qui la reçoit.

JigoKu Kokoro a écrit:Je reste sur mon avis de départ la notion d'art est avant tout une question de perception personelle liée à notre sensibilité emotionelle à la démarche ou à l'œuvre qui est devant nous

En ne retenant que sa visée et en ignorant tout l'amont (l'idée et la conception) est-ce que vous ne dépouillez pas l'art d'une partie de son essence? Si pour vous l'art n'est QUE "suscitement" d'émotion et de réflexion, en ce cas toute cause entraînant effets au niveau de l'affect et de l'intellect devient art: un drame, un heureux événement, le charme d'une personne. Bien sûr je caricature, mais seulement pour souligner l'égale importance de l'oeuvre en elle-même, sous tous ces aspects.


Au fait:
Kenji Shinoda a écrit:J'aimerais beaucoup connaître ceux dont vous appréciez le plus le travail dans le domaine de la peinture et de la sculpture.
Pour ma part, Klimt est celui dont j'apprécie le plus le style avec ces portraits hypnotiques, presque fantomatiques, de femmes ainsi que de son remplissage en dorure....(par contre je suis moins réceptif à ses tableaux de paysages)
Et j'aimerai aussi cité Fantin-Latour qui en plus de l'époustouflant réalisme dont font preuve ses tableaux, il possède une maîtrise parfaite de la lumière qui ne cesse de me fasciner.
En sculpture j'ai bien trop peu de connaissance en la matière pour pouvoir en désigner un.


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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar JigoKu Kokoro » 01 Mar 2014 00:19

Kenji Shinoda a écrit:En ne retenant que sa visée et en ignorant tout l'amont (l'idée et la conception) est-ce que vous ne dépouillez pas l'art d'une partie de son essence? Si pour vous l'art n'est QUE "suscitement" d'émotion et de réflexion, en ce cas toute cause entraînant effets au niveau de l'affect et de l'intellect devient art: un drame, un heureux événement, le charme d'une personne. Bien sûr je caricature, mais seulement pour souligner l'égale importance de l'oeuvre en elle-même, sous tous ces aspects.


Je te dirais que peut importe l'état d'esprit où la méthode de création, tout comme ce que l'artiste a voulu faire passer, c'est la réaction du public qui prime et donc sa sensibilité à l’œuvre exposé devant eux. "Dénaturer" n'est pas vraiment le mot car quand un artiste expose son travail, il l'offre alors aux regards des autres. Ceci y verront ou non tout ou une partie de ce que lui a voulu placer dedans ou communiquer.
Je n'aurai pas la prétention de me considérer comme "artiste" mais après avoir fait lire certaines de mes histoires à plusieurs personnes, j'ai pu voir la différence de réception émotionnelle suivant la personne. Tout comme je me suis aperçu qu'une fois acquise par la personne, mon travail prenait alors un autre visage, d'autres idées et que bien souvent certaines de mes intentions n'avaient pas forcément été prises telles je les avais données.
Une fois exposée aux autres, un travail "artistique" n'appartient plus totalement à son auteur. Il vit un peu son histoire en parallèle.
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar C8H10N4O2 » 01 Mar 2014 07:04

Kenji Shinoda a écrit:En ne retenant que sa visée et en ignorant tout l'amont (l'idée et la conception) est-ce que vous ne dépouillez pas l'art d'une partie de son essence ?


Permets-moi de te retourner une question. En faisant de l'art un processus mécanique explicable et mesurable, ne le prives tu pas d'une partie essentielle de ce qu'il est ? Création et production sont similaires en bien des points de vue, cependant si l'on parle de produits d'une part et d'oeuvres d'art d'autre part, la différence se fait au niveau de la perception par la "clientèle". Pour ce qui est de l'art ayant une existence définitive sans qu'il y ait un public, je ne suis pas d'accord. Prenons un simple exemple, une statue que personne ne voit ne sera qu'une pierre sur laquelle se posent les oiseaux ... en y laissant un souvenir de leur passage :P
Elle devient ou ne redevient une sculpture qu'à partir du moment où quelqu'un la voit et la reconnait en tant que telle.

Il y a certes une intention de la part du créateur, et des moyens physiques mis en oeuvre, mais tout ceci est vain si le résultat n'est pas "décodé" par ceux qui le reçoivent. Il n'y a pas de cahier des charges, de livre des règles. Les méthodes et les techniques ne sont que des moyens, ce ne sont pas eux qui font où défont l'art. L'intention et l'exécution ne sont pas suffisants pour produire une oeuvre d'art. L'intention elle même n'est même pas forcément indispensable.
Quand à l'autre point, il y a effectivements des vecteurs/évènements/quoi que ce soit qui peuvent produire des effets similaires sinon identiques à l'art, mais les considérer eux-mêmes comme étant comparables à de l'art est une erreur de perspective.
Des moyens différents peuvent aboutir au même résultat.

Pour ce qui est de ta démarche, elle est bien plus que seulement réaliste comme tu le revendiques. Elle est très clairement matérialiste. Tu cherches à faire de l'art qui est un concept abstrait quelque chose de physique. En te focalisant sur le support -l'oeuvre- tu ne vas pas au bout du processus artistique, tu ne fais que le commencer.
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Re: Amis de la Sagesse: Réflexions, Maïeutique, Débats

Messagepar kthulu » 04 Mar 2014 12:28

Kenji Shinoda a écrit: Et cette vision que tu propose est très similaire à celle de l'idéalisme. L'es-tu?

Je suis réaliste de part ma formation universitaire en génétique et physiologie. Mais malgré mes études, je n'essaye pas d'avoir une approche scientifique de l'art car je pense que cela est voué à l'échec.
Kenji Shinoda a écrit:En ne retenant que sa visée et en ignorant tout l'amont (l'idée et la conception) est-ce que vous ne dépouillez pas l'art d'une partie de son essence? Si pour vous l'art n'est QUE "suscitement" d'émotion et de réflexion, en ce cas toute cause entraînant effets au niveau de l'affect et de l'intellect devient art

Si tu réduis l'art à de simple paramètre mesurable ne le prives-tu pas de sont essence même?
Par ce que dans un dessin technique, il y a une idée et une conception mais ceci n'est pas de l'art pour autant.
Certes, il y a tout un travail en amont mais si tu n'utilises que la théorie sans l'affect, arriveras-tu à créer de l'art?
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