ai-je toujours l'air d'une douce rêveuse idéaliste?
Sans méchanceté aucune Tité, oui.
Faire marcher 2 personnes dans le même sens c'est jouable. Faire marcher 10 personnes dans le même sens ça devient difficile. Alors faire marcher la population entière des pays industrialisés, c'est totalement utopique.
Il y a ceux que ça concerne et qui peuvent faire quelquechose, ceux que ça concerne et qui ne peuvent rien faire (ou trop peu), ceux qui s'en foutent mais qui feront peut être quelquechose (ceux là faut pas chercher à les comprendre mais ils existent), et ceux qui s'en foutent et qui ne feront rien.
L'idée est à 200% louable, mais tu ne peux pas sensibiliser une race entière à ce problème; à moins qu'on se fasse tous lobotomiser. Et là, la planète idéale s'offre à nous
pour le fait de rouler à 50km-h en 3ème, est-ce la seule chose qui fait consommer plus tu penses? Et si ca n'est qu'une question d'expérience, peut-on leur conseiller de passer la 4ème plus tard?
Là le débat va être très long car l'éco-conduite et la sécurité routière ce n'est plus seulement une question de "est-ce que avec ma voiture à 50km/h je roule en 3 ou en 4?"
D'abord tout est une question de véhicule. Sur les milieux de gamme actuels, et globalement ceux qu'on utilise en auto-école, les rapports de boite sont étudiés pour que entre 35 et 60 tu puisses rouler tranquillement en 3. Par contre prends ma vieille Super5, en ville à 50 je roule en 4. C'est pas pour me forcer à être en sous-régime et écolo, c'est parce que c'est une mécanique qui date de plus de 20 ans, et qu'à 50 j'ai un régime moteur qui me réclame de passer la 4.
Rouler en sous-régime, tu peux le faire, mais tu fatigues la mécanique de ton moteur et je ne suis pas sur qu'au final tu y gagnes grand chose. Sinon des directives du Ministère des Transports dont on dépend seraient tombées depuis longtemps pour aller dans ce sens. On commence seulement à parler d'apprendre à contourner les rond-points en 3, mais ça j'y viendrai plus loin et tu comprendras pourquoi.
L'éco-conduite donc. Vaste programme que je vais m'efforcer de faire court et simple.
L'éco-conduite ce n'est pas que conduire économique ou écologique, c'est allier les 2 à la fois, et savoir un minimum entretenir son véhicule pour y gagner question consommation d'essence et frais d'entretien.
Donc on apprend à ne pas pousser ses rapports comme un âne, on apprend l'anticipation de manière à utiliser avec le plus de douceur possible le frein (ce n'est pas uniquement pour le confort du moniteur, mais aussi car si le jeu de plaquettes de frein est mort, le garage nous facture le remplacement à la fin de la location des véhicules) et on dispense quelques notions pratiques d'entretien du véhicule de manière à ne pas trop consommer pour rien (galeries de toit, utilisation de la clim', entretien et changement des filtres à huile et à air, pression des pneus, utilisation des appareils électriques du véhicule...)
Ca c'est ce qui nous concerne directement en tant que moniteurs, et que nous nous efforçons de transmettre aux élèves. Faut pas se voiler la face, y'a des vieux de la vieille qui n'en ont rien à carrer et qui ne voit en l'élève que la mâne financière qu'il représente. Pour l'éco-conduite il n'aura qu'à se démerder.
La Sécurité Routière maintenant, que je vais mettre à mal, toujours en rapport plus ou moins direct avec tes suggestions Tité. Pourtant en tant qu'acteur de la sécurité routière je pourrai voir tous les aspects positifs de certaines mesures, mais pour celles que je vais citer, j'ai du mal.
Je vais commencer par les ronds points.
Aménagement le plus récent de l'histoire de nos routes, le rond point se veut être un carrefour qui limite les accidents. D'ailleurs la mode est que dès qu'un accident mortel est occasionné à une intersection, on se dépèche de voter les budgets pour réaménager le carrefour mortel en giratoire.
Alors moi je veux bien qu'on se gargarise de voir fleurir les giratoires un peu partout mais un giratoire ça a ses limites.
Tout d'abord ça reste une intersection, donc ça reste ce qu'on appelle "une zone de conflit" et le risque d'accident est toujours présent. Certe si accident il y a il risque d'être moins mortel puisque les protagonistes roulent moins vite que si on avait un carrefour traditionnel (notre route qui file tout droit, une route à gauche et une autre à droite), mais le risque n'est pas éradiqué. Un choc à 30 km/h peut suffire pour tuer un passager non ceinturé (pour l'anecdote, depuis une année que j'exerce j'ai assisté en live à 2 accidents sur des ronds points: 2 personnes qui se rentre dedans, et une sortie de piste à cause de la neige; heureusement que le lampadaire était là pour arrêter la voiture
).
Ensuite un rond point ça force à quoi? Et bien à freiner (usure des plaquettes qu'on aurait pas si la route était restée droite) et à réaccélérer quand on en sort, et on sait que les véhicules consomment bien plus lors des accélérations que lors du maintient de la vitesse. En plus de celà, comme il faut tourner autours d'un terre-plein, avec la force centrifuge et le déport de masse nous accroissons l'usure des pneumatiques à emprunter ce genre d'aménagements.
J'en rajoute une couche au sujet des VUP (véhicules d'urgence prioritaires comme les pompiers ou le SAMU). ils sont prioritaires, donc quel que soit le type d'intersection n'importe qui doit s'arrêter pour les laisser passer. Même si ils arrivent à pleine bombe sur un stop ou un feu rouge. Ca c'est bien dans l'esprit des gens, ça pose peu de problèmes. Mais quand ils arrivent face à un rond point, tout prioritaires qu'ils sont ils sont bien obligés de freiner comme des malades, faire le tour, et réaccélérer de plus belle. Résultat: plus d'usure du véhicule, plus de pollution, et plus de retard sur les lieux du sinistre. Pour éviter des morts à un carrefour, on va prendre le risque d'en laisser d'autres mourir plus loin parce que les secours ne seront pas arrivés à temps...
Au tour de ta proposition de covoiturage d'être remise en question, proposition aussi émise par le Ministère des Transports, surtout en cas de pic de pollution dans les grandes villes.
Accidentologie de 2006: 4700 morts sur les routes françaises; 30% d'entre eux à cause du facteur "alcool", soit 1410 morts.
Accidentologie de 2007: 4600 morts sur les routes françaises; 40% d'entre eux à cause du facteur "alcool", soit 1840 morts.
Les morts comptabilisés par la sécurité routière sont des morts à 30 jours, ce qui veut dire que si une personne décède dans les 30 jours qui suivent l'accident, on rend l'accident responsable du décès. Et quand je dis que le facteur alcool est retenu, ça ne veut bien sur pas dire que 1410, puis 1840 personnes mortes étaient ivres au volant, non, ça veut dire qu'il y avait ceux qui étaient ivres et ceux qui étaient clean parmis les morts recensés.
Et on estime à environ 3% le nombre permanent de personnes en état d'ébriété au volant.
En 2006, on compte 102000 blessés, graves et légers, avec parmis eux ceux qui resteront invalides à vie et ceux qui sont dans le comas.
On compte sur le sol français quand même presque 107000 accidentés ou tués pour "seulement" 85000 accidents corporels, plus d'1/3 de ces accidents (environ 32000) n'impliquent qu'un seul véhicule.
Les heures et les trajets qui dénombrent la plus forte fréquence d'accidents sont les heures de boulot (aller ou retour) et les trajets pour se rendre au taf (plus on connait la route moins on est vigilant)
Je n'ai volontairement pas pris en compte les accidents matériels dont un taux pourrait se transformer en accidents corporels si le véhicule compte plus d'occupants dans le cadre de covoiturage.
Diminuer le nombre de véhicules sur les routes grâce au covoiturage fera-t-il changer ces grandes tendances? Je n'en suis pas sur. Mettre le facteur écologique en avant en ne prenant pas en compte ces tendances serait une erreur susceptible de faire grimper de manière assez conséquente les chiffres de l'accidentologie métropolitaine française. Bon, en même temps je sais que je suis mû par un pessimisme hors du commun mais les attitudes au volant sont lentes à faire évoluer. On a beau dire, on a beau faire, chacun au final n'en fait qu'à sa tête, pensant qu'il est plus malin que les autres.